mardi 29 juin 2010

LE FABULEUX DESTIN DE BOULANGER

Lu sur le site du journal Nord Eclair le 29 juin 2010
Le fabuleux destin de Boulanger

Publié le dimanche 27 juin 2010 à 06h00

Bernard Boulanger a créé les magasins qui portent son nom : «J'étais doué pour le commerce», sourit-il. Bernard Boulanger a créé les magasins qui portent son nom : «J'étais doué pour le commerce», sourit-il.


GENS D'ICI Les magasins Boulanger, c'est lui. Bernard Boulanger, parti de rien, en a été le créateur puis le PDG jusqu'en 1986.


Rencontre atypique.
MARIE GOUDESEUNE > region@nordeclair.fr
C'est derrière ce visage que se déploie toute l'histoire des magasins d'éle ctroménager Boulanger. Bernard est un homme du Nord parti de rien, devenu PDG. Et le voilà dans son jardin, à Genech, où il fête aujourd'hui ses 82 ans.


Souvent, il reste en retrait, préfère que ce soit son épouse Danielle qui parle pour lui. Parfois aussi, il ferme les yeux, mais c'est pour revenir d'un bloc et décocher avec malice : « Je ne parlerai qu'en présence de mon avocat. » Alors, la « saga Boulanger », comment a-t-elle commencé ? Un jour, le jeune Bernard revient de son service militaire au Maroc. « Maman, qui était toute seule (le père est décédé en 1940, ndlr), me demande "Qu'est-ce que tu vas faire ?" » Il rejoint son frère Gustave qui fabrique des postes de radio et de télévision. L'un construit, l'autre vend : « J'étais doué pour le commerce. Il y a des types qui naissent commerçants, d'autres non. Moi je trouve ça motivant. Ça change tout le temps. » On est en 1950. Six ans plus tard, Gustave décède. La fabrication s'arrête et Bernard, 27 ans, reste seul à tenir les rênes des magasins.
Peut-on faire du commerce aujourd'hui comme on en faisait il y a 50 ans ? Danielle se souvient en tout cas des « fameuses Trente Glorieuses. Il n'y avait pas de conflits, on était en expansion permanente. » Boulanger est alors leader dans la région. Entre 1970 et 1980, le magasin de la rue Gambetta à Lille s'agrandit (35 m² en 1958, 1 500 en 1971). D'autres s'ouvrent à Armentières, Wattrelos, Lens, Boulogne... De 9 millions de francs de chiffre d'affaires en 1968, il passe à 200 millions en 1978, avec plus de 500 salariés. Danielle se souvient qu' « un gars volontaire, qui voulait gagner sa vie et qui présentait bien pouvait progresser rapidement et même devenir chef de magasin. » Parfois, le Bernard Boulanger d'aujourd'hui, assis dans son fauteuil, n'a plus envie d'évoquer tout ça. « Je voudrais avoir encore 20 ans et toutes mes dents », glisse-t-il entre deux silences. Quand sa femme, collaboratrice éclairée, poursuit imperturbable l'épopée de cette vie - elle étudiait aux Beaux-Arts quand ils se sont rencontrés : il se promenait, il l'a draguée... -, lui intervient pour dire l'essentiel : « Le plus important, c'est le client ». Satisfaire le client, connaître ses besoins, ses envies, son budget, et l'informer : « Les produits et les clients, ça va ensemble. Un bon vendeur, c'est celui qui fait parler le client, qui fait attention à lui. » Des familles entières venaient au magasin, raconte Danielle, « parce qu'elles savaient qu'on faisait attention à elles. » C'était, en quelque sorte, la marque de fabrique de son mari : « Tu m'as fait aller deux fois chez une cliente à Cysoing pour un moulin à café défectueux : j'ai fini par lui donner le mien ! »
Face au géant Darty
C'est l'arrivée de Darty dans la région qui change la donne. Les relations, jusqu'ici cordiales voire amicales avec l'autre géant de Paris, tournent au vinaigre quand il vient s'installer à Roubaix. « Leurs méthodes pour nous concurrencer étaient assez dures : ils mettaient au sol des pas adhésifs qui partaient de nos magasins vers les leurs... » Le slogan « Boulanger Frères fait mieux que vendre, il vous rend service » se heurte à celui de Darty sur le mode « Si vous trouvez moins cher ailleurs, on vous rembourse la différence. » Une franchise Boulanger est alors créée pour « essayer de se disséminer dans toute la France et de tenir Darty en respect. » Boulanger ouvre son capital à Suez, puis à Auchan, qui rachètera finalement la totalité des parts en 1986.
Bernard Boulanger n'a jamais été mondain. « Travailleur, ambitieux, atypique » aux yeux de son épouse, il préférait aux soirées flamboyantes son immense jardin de Genech et ses arbres plantés au cours des années. Assis au soleil, il déclare aujourd'hui que « ce qui m'a sauvé, c'est ça. Mon jardin c'est ma vie. »w

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