lundi 26 octobre 2009

Les consommateurs se replieront sur des produits "de qualité, utiles,

Lu dans le journal Le Monde du 24 octobre 2009
Le patron de Tod's voit la sortie de crise pour le luxe
LE MONDE | 24.10.09 | 14h52 • Mis à jour le 24.10.09 | 19h34

L'une des plus grandes figures du patronat italien, Diego Della Valle, propriétaire du groupe de luxe Tod's, reste assez confiant sur la sortie de crise du secteur. "Je rentre d'Asie. En Chine, en Corée, à Hongkong, les affaires sont excellentes", explique-t-il au Monde. Au point que son groupe confirme son projet d'ouverture d'une dizaine de magasins sur ce continent en 2010. "Voire plus", en fonction des résultats du premier semestre.
En 1978, Diego Della Valle, fils et petit-fils de cordonniers de la région des Marches (Italie), s'inspire du mocassin de conduite automobile pour créer "Il Gommino", dont la semelle est hérissée de 133 picots. Le groupe Tod's détient aussi les marques de chaussures Hogan, Roger Vivier, et les vêtements Fay. Il fabrique chaque année 2,5 millions de paires de chaussures.

Les résultats Au premier semestre, le chiffre d'affaires du groupe s'est élevé à 359 millions d'euros (+ 3,4 %). Les chaussures ont représenté 260,9 millions d'euros (+ 7,7 %), la maroquinerie 59,2 millions (- 9,5 %) et les vêtements 38,5 millions (- 1,6 %).

Les marchés En Italie, les ventes semestrielles ont progressé de 10,1 %, à 200,5 millions d'euros. Dans le reste de l'Europe, elles se sont établies à 77,6 millions d'euros (en baisse de 7 %) et à 22,9 millions d'euros (- 23,6 %) en Amérique du Nord. En Asie, elles se sont élevées à 58 millions d'euros, en hausse de 12,7 %.


Le marché des chaussures et de la maroquinerie de luxe semble imperméable à la crise. Celle-ci n'a jusqu'à présent guère affecté les résultats du groupe : au premier semestre, les ventes ont continué à croître (+ 3,4 % à 359 millions d'euros), comme le résultat net (+ 2,9 %). "On commence à voir un début de retournement positif aux Etats-Unis et en Europe", souligne même M. Della Valle.

Mais "le marché du luxe ne sera plus le même après la crise". Les consommateurs ne seront plus d'humeur à acheter n'importe quoi à des prix extravagants. Ils se replieront sur des produits "de qualité, utiles, iconiques, conçus avec une part de rêve, surtout s'ils les paient cher".

"Capacité d'expansion"

Si la crise a mis à terre (Ferré) ou fragilisé (Cavalli ou Prada) plusieurs géants du luxe en Italie, Tod's compte "grandir grâce à sa propre capacité d'expansion, sans acheter qui que ce soit". Ce qui ne l'a pas empêché de prendre en mai 5,9 % des grands magasins américains Saks Fifth Avenue, "à un prix très correct", afin de "profiter de la reprise quand elle arrivera". Ou encore 2,6 % de l'opticien italien Safilo, qui vient de passer sous pavillon néerlandais.

Face aux difficultés financières très graves que traverse l'industrie textile italienne, le PDG de Tod's estime que l'Etat devrait aider en priorité ces petites et moyennes entreprises, qui jouent un rôle "d'ambassadeur" de l'Italie dans le monde entier.

Quant à la nouvelle législation transalpine sur le made in Italy, le patron de Tod's y voit une "opportunité très forte pour la maroquinerie et les chaussures", une garantie de qualité "au même titre que le made in France l'est pour les parfums", dit celui qui met un point d'honneur à fabriquer tous ses produits dans la Péninsule.

Tod's étant coté à la Bourse de Milan, Diego Della Valle n'est guère disert sur les prévisions financières du groupe. Tout au plus concède-t-il qu'il réalisera "une bonne année 2009", dans des conditions difficiles, si le deuxième semestre confirme l'élan du premier.

De 2003 à 2008, son chiffre d'affaires est passé de plus de 500 millions d'euros à plus de 700 millions, tandis que son résultat brut d'exploitation (Ebitda) croissait de 113 millions d'euros à 156 millions.

Seule la marque de chaussures Roger Vivier reste dans le rouge. "Nous avons réalisé d'importants investissements pour ouvrir nos propres points de vente, explique-t-il. C'est une marque qui fait rêver, il faut prendre le temps avant qu'elle soit rentabilisée." Si les deux marques Tod's et Hogan ont bien résisté à la crise, la griffe Schiaparelli, rachetée par le groupe, restera encore "un rêve dans le tiroir pendant au moins deux ou trois ans, le temps de rentabiliser Roger Vivier avant de la relancer".

Le patron de Tod's se consacre aussi à d'autres affaires familiales. Avec son frère Andréa, il est propriétaire de l'équipe de football de Florence - la Fiorentina. "L'objectif est de ne pas perdre d'argent", pas d'en gagner. "Tod's occupe tout mon temps", dit son PDG, qui se définit comme "libéral". Il est aussi impliqué dans la presse - comme actionnaire minoritaire de RCS, l'éditeur du Corriere della Sera (Milan) ou d'El Mundo en Espagne. Depuis 2000, il détient par ailleurs 0,34 % de la société éditrice du Monde.

Son autre grand projet n'est autre que la nouvelle société privée de chemins de fer, Nuovo Trasporto Viggiatori (NTV), qui doit progressivement relier Rome, Milan, Venise et Bari dès 2011. Avec Luca Cordero di Montezemolo, le patron de Ferrari, et Gianni Punzo, un entrepreneur présent dans le secteur ferroviaire, le patron de Tod's en est le premier actionnaire. Des chaussures aux trains à grande vitesse, il n'y a... qu'un pas.

Diego Della Valle, qui fut longtemps l'un des patrons les plus ouvertement hostiles au président du conseil Silvio Berlusconi, adopte aujourd'hui une approche plus nuancée. "Il a gagné les élections. Il est important qu'il puisse gouverner et arriver à la fin de son mandat. D'ici là, l'opposition, très faible, doit se reconstituer, retrouver son âme et les Italiens pourront alors choisir."
Nicole Vulser

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