lundi 25 octobre 2010

MONOPRIX EN TOUTE FRANCHISE

lu sur le site Business Week le 25 octobre 2010

Monoprix en toute franchise


Par Nizar BAHLOUL

Ce qu’a fait cette semaine la chaîne Monoprix est à inscrire dans les annales de l’Histoire de la grande distribution.
Vous verrez, les enseignes concurrentes et autres Carrefour et Magasin Général, vont reprendre l’idée dans les plus brefs délais, sinon elles seront « cannibalisées » par Monoprix.
L’idée n’a rien de nouvelle et se pratique à large échelle ailleurs dans le monde et à toute petite échelle en Tunisie. Il s’agit d’offrir sa marque en franchise. Elle aura importé le concept, dans le secteur, de celui où l’on peut voir son réseau se multiplier à l’infini (ou presque) sans quasiment rien investir. Ou, du moins, sans risquer grand-chose. Chapeau l’artiste !

De dehors la chose se présente de la façon suivante :
Monoprix participe à la création de nouvelles opportunités d’emploi dans le pays et encourage les jeunes à se mettre à leur propre compte.
Quand vous êtes un diplômé de l’enseignement supérieur et que vous n’arrivez pas à trouver un projet rentable et convaincant pour votre banquier, Monoprix vous apporte la solution.
Ouvrez un magasin en franchise et l’enseigne vous dispense la formation nécessaire. Mieux que cela, elle vous livre la marchandise et vous fixe même les marges. Cerise sur le gâteau, elle vous offrira le business plan qui convaincra le banquier. Et si vous voulez tout savoir, le banquier est déjà convaincu et a même signé une convention avec Monoprix pour que vous, chômeur de longue durée, trouviez un emploi ! Mieux, devenez un homme d’affaires. Car si vous réussissez votre premier magasin franchisé, vous pourriez ouvrir un deuxième puis un troisième et un quatrième et un cinquième etc.
Wall Mart, numéro un mondial de la grande surface, a commencé comme ça !

Monoprix, qui possède aujourd’hui 70 magasins totalisant 45585 m² de surface, peut voir son réseau étendu jusqu’aux toutes petites bourgades du territoire.
Elle aura récolté le montant de la redevance périodique et surtout imposé ses articles à l’ensemble de ses magasins franchisés.
Hier, Monoprix prenait des risques en investissant à tel ou tel endroit. Et chaque magasin ouvert apportait son lot de dépenses : décoration, installation des équipements, sécurité, personnel, entretien, assurances, etc. Et, bien sûr, n’importe quel magasin ouvert doit être quotidiennement livré en marchandises avec les coûts que cela suppose en logistique : camion, carburant, chauffeur, entretien…
Demain, Monoprix ne prendra plus tous ces risques en investissant tel ou tel endroit. Chaque magasin ouvert apportera son lot de recettes : ventes, redevance, image.
Si, bien sûr, n’importe quel magasin ouvert doit être quotidiennement livré en marchandises, les coûts seront désormais supportés par le franchisé qui n’a qu’à venir se livrer lui-même auprès de la centrale d’achat. La centrale d’achat de Monoprix, bien sûr, et non celle d’un concurrent.

Ce qui est extraordinaire dans l’histoire, c’est que Monoprix ne risque quasiment rien. C’est le jeune futur franchisé qui fera tout pour souscrire un crédit. C’est lui qui assurera le risque et sera redevable devant la banque. C’est encore lui qui s’occupera de toutes les tracasseries administratives liées à l’ouverture de n’importe quelle échoppe et n’importe quelle entreprise. Et c’est lui qui devra assurer la trésorerie nécessaire pour payer les fournisseurs (pardon le fournisseur puisqu’il n’a que Monoprix qui lui fournit la marchandise), régler les salaires et les impôts.

Hier, ou plutôt avant-hier, les jeunes (notamment Djerbiens) ouvraient une échoppe d’épicier et travaillaient 20 heures sur 24, onze mois sur douze. Le douzième mois de l’année étant consacré aux épouses restées au bled.
Demain, il vous faudra un beau diplôme pour faire le même travail, mais en plus chic : vous êtes un chef d’entreprise franchisé Monoprix avec des salariés. Vous travaillerez 20 heures sur 24 et, contrairement à nos aïeux, douze mois sur douze. Quand on est franchisé et qu’on désire élargir son réseau de Mini M (c’est comme ça que les nouvelles épiceries s’appelleront), il vaut mieux ne pas prendre de congé annuel ou, au cas échéant, le minimum possible.
Ce n’est ainsi que vous pourriez gagner (avec Monoprix) le maximum possible.
N’est-elle pas géniale leur idée ? Vous pariez combien qu’elle sera reprise très bientôt par les autres enseignes ? Elles ne peuvent quand même pas ne pas participer aux efforts de l’Etat et de la société pour la résorption du chômage !

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